ABND : Chapitre second

Chapitre 2

- Bon, puisqu’il ne rentrera pas avant bien des heures le connaissant, et si nous rentrions tous chez le professeur pour que vous me disiez ce qui s’est passé depuis vos dernières vacances ?

Comme à l’époque de leur enfance, le trio répond en cœur, le poing levé « Oy ! » en approbation. Un petit sourire de nostalgie se dessine sur le visage de la femme, amusée des souvenirs qui remontent toujours à la surface quand elle les retrouve, ses fidèles amis. Agase se sent de même heureux. Il considère le trio de jeunes gens comme les petits-enfants qu’il n’a jamais eu mais il a toujours été proche d’Ai Haibara au point de la considérer presque comme sa fille. Et elle a bien grandie, est devenue une femme, a une situation et son caractère a changé en s’adoucissant. La discussion chez le professeur est joyeuse, emplie de souvenirs, drôle d’anecdotes ; familiale. Elle se finit en un karaoké et depuis la rue, le Sherlock Holmes du vingt-et-unième siècle entend « Libérée, délivrée, c’est décidé… » Il peut deviner quelle en est la chanson et en est amusé. Lui ne sait pas encore s’il possède ces trois termes. Conan Edogawa a passé la journée au cimetière pour payer ses respects sur la tombe de Shinichi Kudo. Tous les dangers qui planaient sur le défunt sont morts avec lui mais le détective accompli n’arrive cependant pas à trouver pourquoi il avait une boule à la gorge et un vrombissement dans le cœur à l’aéroport. Comme avant, il a prétexté une pause toilette pour filer mais actuellement, il ne sait pas pourquoi, il trouve cette astuce de gamin amusante avec l’âge. Aux Etats-Unis, il n’avait pas à trouver des stratagèmes pour dévoiler la vérité. Ses secrets… Alors, la chanson passe le passage « Je ne mentirai plus jamais »…

***

Une bonne nuit de sommeil pour tout le monde et l’ambiance le lendemain à l’ancien lycée de Shinichi Kudo est électrique. Dans la salle de représentation, la promotion de cette année des classes 1-A à 1-E occupe les sièges du public avec les amis et la famille. Le trio est nerveux à l’idée de partir étudier dans une université après cette remise de diplômes. La professeure de karaté Ran Mouri n’aurait raté cela pour rien au monde. Elle les a vu grandir ces petits bouts de choux et les voici quasiment devenus des adultes ; c’en est émouvant. A ses côtés, Eri Kisaki, toujours aussi soignée concernant sa tenue attend de grandes choses d’Ayumi qui deviendra sa protégée jusqu’à l’obtention de sa licence en droit. Quant à Kogoro Mouri, qui fume et boit toujours autant, ses tempes grisonnantes n’attestent pas qu’il a vieilli mais que sa collaboration avec sa femme le fatigue. Il ne pouvait pas assurer sa réputation de détective après le départ de Conan, accumulant erreur sur erreur dans ses déductions et le voici actuellement en partenariat avec sa femme comme investigateur. Force est de constater qu’il se débrouille bien sans avoir à rougir de son ancien travail, même si l’ambiance au cabinet Kisaki est parfois dangereuse pour les personnes à proximité. En dix ans, rien n’a changé entre eux deux, toujours deux coqs dans la même basse-cour, et cela fait esquisser un début de sourire sur le visage de Conan. Ce dernier s’est informé sur tout le monde pendant la nuit qui précède cette matinée.

- Je reconnais bien cette expression, mec !

Se croyant invisible au regard de tous, dissimulé dans la cabine de la régie qui assure que le micro du proviseur ne parlera pas dans le vide, il se retourne pour voir l’actuel plus grand détective du Japon, son ancien rival et meilleur ami : Heiji Hattori.

- Cela faisait longtemps depuis la dernière fois. Si mes déductions sont exactes, tu te planques ici pour vérifier que ce que tu sais de tout le monde est vrai. J’ai raison ?

- A toi de me le dire. Quand est-ce que tu comptes l’épouser ?

- Hein ?

- Kazuah-chan, ta concubine, la mère de ta fille de quatre ans qu’elle élève chez vous à Osaka. Tu vis bien avec elle en couple, alors quand est-ce que tu comptes l’épouser ?

-Eh ben, j’avais oublié que quand tu fais des enquêtes, tu trouves toujours tout. Et puis ce n’est pas pressé, d’ailleurs ! C’est une affaire entre Kazuha et moi et… et…

Un silence de gêne pour le détective d’Osaka rougissant s’installe puis il retourne sa casquette et analyse à son tour l’homme en face de lui alors qu’il jette son regard ailleurs pour éviter sa déduction mais trop tard. Quasiment comme deux frères, ils se connaissent bien au point de tout deviner sur l’autre en un regard.

- Ran-chan ? C’est pour cela, je me trompe ?

- …

- Tu lui as parlée depuis ton retour ?

- Je ne reste que pour la remise des diplômes des Detective Boys puis je repars. D’autres affaires auront eu lieu pendant mon absence à New-York.

Le trentenaire à la peau foncée lui passe le bras autour du cou.

- Ran-chan, elle n’a pas eu de nouvelles de toi pendant dix ans et tu es là, à moins de cinquante mètres d’elle. Elle aura bientôt trente ans et elle n’a pas cessée d’attendre Shinichi pendant six ans. Et ces cinq dernières années…

- J’ai toujours été à côté d’elle mais je ne…

- Oui ?

Il hésite…

Sur scène, le proviseur monte alors et prend place derrière le petit pupitre rectangulaire où il pose la boite contenant les diplômes et s’adresse dans le micro. La cérémonie commence par son discours annuel.

- Chers étudiants du lycée de Beika, félicitations. Vous êtes ici aujourd’hui pour recevoir le fruit de votre travail acharné pendant vos jeunes années jusqu’à aujourd’hui. C’est un vrai plaisir pour moi de vous souhaiter à tous une bonne chance pour l’avenir. Je ne vais pas faire durer le suspense alors j’appelle le premier élève à monter sur l’estrade et venir passer la barrière du lycée à l’université. J’appelle…

- Ta mort !

Se lèvent alors quatre personnes parmi les étudiants et leurs proches qui montent sur l’estrade. Ils s’alignent en diagonale sur la scène et sortent leurs armes. L’audience est paralysée par la surprise. La stupéfaction prend alors un tout autre niveau quand aucun des quatre armés ne vide son arme sur le proviseur. A la surprise générale, l’étudiant du fond de la scène, l’homme âgé à sa droite, la femme âgée encore à droite et l’étudiante du côté public de la scène s’échangent leurs armes. L’arme de l’étudiant passe entre les mains de l’homme et reçoit celle de l’étudiante. La femme donne son arme à l’étudiante et reçoit celle de l’homme. Une seconde fois, l’arme entre les mains de la femme est donnée à l’étudiante et cette dernière donne à l’étudiant la sienne. L’étudiant donne à l’homme son arme et ce dernier donne la sienne à la femme. Un troisième échange a lieu avec l’étudiante qui donne à l’étudiant son arme et qui reçoit de la femme son arme. L’arme de l’homme est donnée à la femme et l’étudiant donne à ce premier son arme. Un dernier échange se produit avec l’étudiant qui donne à l’homme son arme. La femme reçoit celle de l’homme et donne à l’étudiante son arme. Cette dernière en fait autant avec l’étudiant. Personne ne comprend ce qu’il se passe sur scène bien que tout soit détaillé et montré à tous. Les armes sont levées, pointées vers le proviseur et en union, ils poussent un cri de désespoir en appuyant sur les gâchettes « Pour Madoka ! ».

Une détonation abat l’homme qui s’écroule derrière le pupitre. Heiji et Conan sortent en trombe de la régie puis se figent nets : les quatre tueurs ne s’enfuient pas ou ne prennent pas d’otages. Ils s’assoient paisiblement en tailleur, posent leurs armes devant eux et disent au public déconcerté « Que quelqu’un appelle la police, s’il vous plait. Nous nous rendons. ». C’est à ne rien y comprendre et défie toutes les règles des crimes. N’ayant vécu que pour ce genre de moments, attiré inexorablement, un complet bleu, une cravate rouge sur une chemise blanche et des lunettes traversent les rangées de témoins. Des murmures passent entre les témoins et une paire d’yeux bleus sensibles dans le public sort de sa stupeur du crime en entendant les murmures qui se transforment en chuchotements bruyants:

- C’est lui, je te dis.

- Je le croyais aux Etats-Unis. Il est de retour.

- C’est bien lui ? Le Sherlock Holmes de notre ère ? Edogawa Conan-sama ?

- Il est... de retour.